Méthodes numériques pour le calcul à la rupture des structures de génie civil
Jérémy Bleyer  1@  
1 : Laboratoire Navier  (NAVIER)  -  Site web
IFSTTAR, CNRS : UMR8205, École des Ponts ParisTech (ENPC), Université Paris Est (UPE)
Ecole des Ponts ParisTech 6 / 8 avenue Blaise Pascal 77455 CHAMPS SUR MARNE -  France

Les structures de génie civil deviennent de plus en plus complexes tant dans l'utilisation de matériaux fortement hétérogènes (béton armé, béton fibré, planchers mixtes acier/béton...) qu'à travers l'adoption de géométries courbes dans l'espace. L'outil numérique constitue alors un élément indispensable à l'étude de la sécurité de telles structures. Néanmoins, une approche rationnelle du dimensionnement des ouvrages à la ruine fait encore défaut à l'heure actuelle, la majorité des règles de dimensionnement reposant sur une combinaison de calculs élastiques, l'adoption de coefficients de sécurité et une vérification locale des sections critiques.

La théorie du calcul à la rupture (ou de l'analyse limite pour un comportement parfaitement plastique) repose sur l'écriture de la compatibilité entre l'équilibre de la structure d'une part et la vérification locale d'un critère de résistance d'autre part. Elle nous semble être un outil prometteur pour ouvrir la voie à une approche plus rationnelle et moins empirique de la sécurié des ouvrages vis-à-vis de la ruine, tout en reposant sur des ingrédients mécaniques simples. L'enjeu de cette thèse est de surmonter, sur le plan numérique et théorique, les difficultés que pose sa mise en oeuvre pratique pour les structures du génie civil.

La mise en oeuvre numérique des approches statique et cinématique du calcul à la rupture conduit à la résolution d'un problème d'optimisation convexe sous contraintes. Les progrès relativement récents effectués dans le domaine de l'analyse convexe ont permis de mettre au point des algorithmes très efficaces (de type points intérieurs) pour la résolution d'une grande classe de problèmes, relevant du domaine de la programmation conique. Forts de cet outil, nous avons développé, au cours de cette thèse, des éléments finis adpatés au calcul à la rupture (en efforts généralisés pour l'approche statique ou en vitesse virtuelle pour l'approche cinématique) pour différents modèles mécaniques : plaques minces en flexion, plaques épaisses, coques, etc. La particularité du calcul à la rupture conduit à envisager des éléments finis différents des éléments utilisés classiquement pour les calculs élastiques (de type équilibre ou incluant des discontinuités de vitesse). Un accent particulier est porté sur la formulation de critères de résistance en efforts généralisés pour les différents types de structures considérés.

D'autre part, la théorie de l'homogénéisation en calcul à la rupture est un moyen performant de traiter le cas des structures présentant une forte hétérogénéité du matériau, variant de manière périodique dans l'espace. Cette approche repose sur la détermination numérique de critères de résistance homogènes équivalents qu'il est nécessaire d'approximer de manière à pouvoir effectuer le calcul à l'échelle de la structure homogénéisée. Des procédures d'approximation innovantes sont spécifiquement développées pour atteindre cet objectif.

Enfin, nous illustrons les potentialités de ce type d'approche ainsi que l'efficacité des outils numériques développés sur deux exemples complexes d'ingénierie. Le premier traite de la stabilité au feu de panneaux en béton armé de grande hauteur. La stabilité de ce type de structure est pilotée, d'une part par une déformation d'origine thermique conduisant à une configuration géométrique courbe, d'autre part par la dégradation des capacités de résistance des matériaux due à la présence d'un gradient thermique dans l'épaisseur du panneau. Les outils développés au cours de la thèse servent alors à évaluer la ruine de ces panneaux à partir de la connaissance de leur configuration géométrique déformée. Le deuxième exemple concerne le calcul de la marquise de la gare d'Austerlitz, une coque courbe en béton armé, perforée par un réseau périodique de pavés de verre. Une démarche par homogénéisation périodique est alors proposée afin d'évaluer la sécurité de la structure vis-à-vis de la ruine pour différents types de chargement.


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