L'analyse de fiabilité reste encore aujourd'hui un challenge industriel. En effet, la multitude de calculs nécessaires à la réalisation de cette étude, associée à l'utilisation toujours plus importante de modèles coûteux comme ceux impliquant un grand nombre d'éléments-finis est un frein majeur à son utilisation courante en industrie. Pour remédier au problème des modèles numériques longs à évaluer, des techniques de métamodélisation sont souvent utilisées. Ce papier propose un état de l'art sur l'une d'entre elles, le krigeage, et présente plus particulièrement une famille récente de méthodes adaptatives basées sur le krigeage, les méthodes AK, initialement développées pour l'analyse de fiabilité.
La première méthode de cette famille est la méthode AK-MCS pour « Active learning and Kriging with Monte Carlo Simulations », proposée en 2011 par Echard, et al. [1]. Cette technique de métamodélisation est utilisée pour classer une base de points dans le domaine de sûreté ou de défaillance. Pour cela, à partir d'un premier plan d'expériences de taille modérée, un premier métamodèle de krigeage est construit. Une fonction d'apprentissage est ensuite évaluée pour augmenter itérativement le plan d'expériences et ainsi améliorer le métamodèle jusqu'au respect d'un critère d'arrêt. A chaque itération de la méthode, la probabilité de défaillance est évaluée comme dans une analyse de fiabilité « classique » en utilisant les simulations de Monte Carlo. La méthode AK-MCS permet d'améliorer le métamodèle dans les zones judicieuses, c'est-à-dire où le risque de mal classer les points est fort. Cette méthode a montré de bons résultats et a été développée suivant plusieurs axes. Des améliorations de la méthode ont été proposées dans le domaine de l'analyse de fiabilité avec l'adaptation de la méthode AK-MCS à d'autres techniques d'évaluation de probabilité de défaillance. En effet, l'utilisation des simulations de Monte Carlo présente un inconvénient majeur, l'atteinte des faibles probabilités de défaillance pose toujours le problème des trop nombreux points à classer. La méthode AK-IS [2] permet par exemple de remplacer les simulations de Monte Carlo par les tirages d'importances devenant plus efficace pour atteindre des probabilités faibles mais posant d'autres problèmes par ailleurs comme dans le cas où plusieurs zones de défaillance les plus probables existent. Cette famille a aussi été adaptée pour résoudre des problèmes de domaines connexes à l'analyse de fiabilité. En métrologie, la méthode AK-ILS [3] permet de vérifier la conformité du profil d'une série de pièces. En optimisation, la méthode proposée par Moustapha, et al. [4] permet d'enrichir le plan d'expériences en deux étapes : globalement avec la fonction d'apprentissage classique de AK-MCS puis plus localement dans les zones d'intérêt de l'optimisation.
Ce papier propose donc un état de l'art de la famille des méthodes AK plus particulièrement en analyse de fiabilité, en présentant les avantages et inconvénients des méthodes ainsi que leur domaine d'efficacité. Des exemples permettront d'illustrer les atouts et les limites de ces méthodes.
[1] Echard, B., N. Gayton et M. Lemaire, AK-MCS: An active learning reliability method combining Kriging and Monte Carlo Simulation, Structural Safety, 33.2, p. 145-154 (2011)
[2] Echard, B., N. Gayton, M. Lemaire et N. Relun, A combined Importance Sampling and Kriging reliability method for small failure probabilities with time-demanding numerical models, Reliability Engineering and System Safety, 111, p. 232-240 (2013).
[3] Dumas, A., B. Echard, N. Gayton, O. Rochat, J.-Y. Dantan et S. Van Der Veen, AK-ILS: An Active learning method based on Kriging for the Inspection of Large Surfaces, Precision Engineering, 37.1, p. 1-9. (2013)
[4] Moustapha, M., B. Sudret, J.-M. Bourinet et B. Guillaume, Quantile-based optimization under uncertainties using adaptive Kriging surrogate models, Structural and Multidisciplinary Optimization, p. 1-19 (2016)