Validation expérimentale d'un couplage de deux modes vibratoires pour la reproduction de la cinématique d'ailes d'insecte et la production de portance
Damien Faux  1, *@  , Olivier Thomas  2, *@  , Sébastien Grondel  1, *@  , Eric Cattan  1, *@  
1 : Institut d'électronique de microélectronique et de nanotechnologie, Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis  (IEMN, UVHC)
CNRS : UMR8520
2 : Arts et Métiers ParisTech, Laboratoire des sciences de l'information et des systèmes  (Arts et Métiers ParisTech, LSIS)
CNRS : UMR7296
* : Auteur correspondant

Parmi les différentes espèces volantes présentes dans la nature, les insectes font sans nul doute montre de capacités des plus impressionnantes en termes de vol stationnaire ou de vive accélération et leur diversité est source de nombreuses solutions pour les systèmes bio-inspirés. En s'intéressant à la cinématique de l'aile d'un insecte volant, on observe qu'elle peut être décomposée en quatre mouvements basiques : le battement vers l'arrière, la supination, le battement vers l'avant et la pronation. Dans le cas d'ailes flexibles, les deux battements impliquent alors un mouvement de flexion de l'aile tandis que la supination et la pronation se résument à un mouvement de torsion de l'aile en quadrature de phase avec le battement précédent. On peut également voir, bien que cela soit sujet à de nombreuses discussions, que l'usage de mécanismes résonants par les insectes volants est démontré par différentes études : notamment l'utilisation des fréquences propres de l'aile, permettant d'excellentes performances pour un minimum de consommation énergétique, ou encore l'exploitation d'un mécanisme résonant reposant sur un autre organe, tel que le thorax, pour certains insectes dont les fréquences de battements diffèrent des fréquences propres de leurs ailes.

Cet article propose donc de coupler un mouvement résonant de flexion et un mouvement résonant de torsion d'une structure flexible d'aile artificielle pour reproduire cette cinématique particulière et générer de la portance. Alors que les mécanismes de vol aujourd'hui utilisés par les nano-véhicules aériens (NAV) s'appuient sur un bord d'attaque rigide articulé lié au thorax et une membrane flexible, notre solution se distingue par l'utilisation d'une aile totalement flexible dont la conception est telle que le mouvement du bord d'attaque soit directement induit par le comportement dynamique de la structure en résonance. Plus précisément, la problématique est de déterminer la géométrie et les propriétés élastiques d'ailes artificielles telles qu'un couplage entre une déformée de flexion et une déformée de torsion en quadrature de phase puisse être obtenu avec l'utilisation d'un unique actionneur. Qualitativement, cela implique de rapprocher les fréquences propres des deux modes visés.

Dans l'optique de ce défi, une configuration optimale de l'aile a été déterminée à l'aide d'une analyse paramétrique réalisée sur les paramètres géométriques du squelette de l'aile modélisé par un assemblage de poutres d'Euler-Bernoulli. Cette configuration d'aile présentant alors des fréquences auxquelles les deux modes sont couplés en quadrature de phase tout en conservant une amplitude non-négligeable en flexion comme en torsion.

Des validations expérimentales ont alors été menées sur des prototypes intégrant cette géométrie d'aile, présentant ainsi une envergure de 22 mm pour un poids total de 22 mg. Ces prototypes sont réalisés à l'aide de procédés de fabrication dédiés aux micro-technologies et sont pourvus d'un actionneur électromagnétique permettant l'actionnement simultané des deux ailes.

Une analyse modale expérimentale a été effectuée à l'aide d'un vibromètre laser et démontre la proximité fréquentielle des modes de flexion et de torsion en excellent accord avec les résultats de la modélisation en termes de déformées opérationnelles comme de fréquences propres. Dans un second temps, un banc de mesure de force de portance dédié a été développé et utilisé pour démontrer la génération par le prototype d'une force de portance équivalente à plus de 110% de son poids. Les maximums de poussée se produisant, comme attendu, aux fréquences de quadratures entre les deux modes. Enfin, des enregistrements à la caméra rapide ont permis de confirmer que ces maximums de force de portance étaient bien obtenus pour des mouvements de grandes amplitudes mêlant mouvement de flexion et mouvement de torsion en quadrature de phase.

 


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