L'élaboration de nouveaux alliages métalliques aux propriétés mécaniques améliorées peut prendre de nombreuses formes. La réduction de taille de grains [1,2] permet une forte augmentation de la résistance mécanique dans les alliages à grains ultra-fins [3]. Ces alliages présentent également une ductilité diminuée ce qui peut être problématique vis-à-vis de leur mise en forme par déformation. Un compromis peut être trouvé avec des microstructures à fort contraste de tailles de grains (ou bimodales) [4]. Elles présentent deux populations distinctes : une à gros grains et une à petits grains. Les gros grains contribuent à la ductilité tandis que les petits apportent la résistance mécanique.
Alors que la plupart des propriétés mécaniques effectives de ces matériaux peuvent être obtenues à partir d'essais de traction, l'étude et la compréhension des mécanismes microstructuraux mis en jeu au cours de la déformation du matériau demandent un travail de préparation et d'analyse avec des moyens conséquents. L'utilisation de microstructures virtuelles et de la plasticité cristalline peut, en complément d'analyses microstructurales expérimentales, permettre une approche alternative pour l'analyse des champs locaux de contrainte et déformation.
L'utilisation de la microscopie électronique à balayage et d'un détecteur à diffraction d'électrons rétrodiffusés (Electron BackScatter Diffraction) permet d'obtenir les principales caractéristiques microstructurales des échantillons de 316L considérés dans cette étude : elles concernent les distributions de tailles de grain, les orientations cristallographiques ainsi que la morphologie des populations de grains. Une partie de ces caractéristiques sont retenues pour la génération de microstructures avec le logiciel Neper [5]. Cette approche permet notamment de générer des microstructures 3D et 2D extrudées à partir de données statistiques obtenues sur un cliché EBSD (2D) représentatif.
La caractérisation des relations microstructure – propriétés élastoplastiques est réalisée par calcul éléments finis avec le logiciel Zset [6]. Deux lois de comportement en plasticité cristalline sont utilisées afin de rendre compte des effets de taille de grains. La première correspond à une approche phénoménologique où un terme dépendant de la taille de grain selon la relation de Hall-Petch est ajouté pour décrire l'évolution de la cission résolue. Elle est peu coûteuse en ressources de calcul et permet d'aborder différents effets de la microstructure en tirant partie de l'approche à champs complets : effets non seulement de la distribution de taille mais aussi du degré de percolation d'une population de grains par exemple. La seconde prend en compte l'évolution des densités de dislocations [7] et intègre les effets de tailles au travers du libre parcours moyen des dislocations. Elle apporte une pertinence physique plus importante vis-à-vis des champs locaux observés car basée sur les mécanismes physiques à l'origine de la plasticité dans les polycristaux. Pour chacune des lois une identification des paramètres est effectuée sur la base d'essais de traction sur des échantillons à distribution unimodale de tailles de grains et pour des tailles moyennes différentes. Les résultats de modélisation sont ensuite confrontés à l'expérience pour des échantillons à distribution bimodale élaborés selon la technique du frittage flash (Spark Plasma Sintering) ou par déformation plastique intense suivie d'un recuit (strain induced martensite reversion-annealing process).
[1] E.O. Hall, Phys. Soc. London 64, 747-753, 1951
[2] N.J. Petch, J. Iron Steel Inst. 174, 25-28, 1953
[3] H. Gleiter, Progress in Materials Science 33, 223-315, 1989
[4] Z. Zhang et al., Materials Science & Engineering: A 598, 106-113, 2014
[5] R. Quey et al., Comput. Methods Appl. Mech. Engrg. 200, 1729-1745, 2011
[6] Z-set, http://www.zset-software.com (2012)
[7] L. Tabourot et al., Materials Science and Engineering: A 234, 639-642, 1997