En France, le dimensionnement des voies ferroviaires repose en grande partie sur les connaissances empiriques rassemblées au fil des années et des projets de développement du réseau ferré. Afin d'optimiser ce dimensionnement, une des ambitions de la communauté scientifique est de mieux comprendre le comportement thermomécanique des voies ferroviaires, notamment sous les circulations réalisées à grande vitesse (supérieure à 300 km/h), et ce à différentes échelles de temps :
- A court terme en étudiant la réponse mécanique des voies sous les sollicitations dynamiques engendrées par le passage d'un véhicule,
- A long terme en étudiant l'évolution de son comportement sous la répétition de ces circulations (qualité de la réponse dynamique, dégradations géométriques, fatigue des composants de voie, etc.).
Si de nombreux travaux sont connus et publiés sur des modélisations expérimentales et/ou numériques du comportement dynamique des infrastructures ferroviaires, le déficit de retours d'expérience quantifiés sur leur comportement in situ freine la mise en place d'une approche de dimensionnement mécanistique des voies ferroviaires.
Les travaux de recherches présentés ici sont relatifs à l'instrumentation mécanique de la Ligne à Grande Vitesse Sud Europe Atlantique (LGV SEA), reliant Tours à Bordeaux. L'objectif de ces travaux est de contribuer au retour d'expérience sur le comportement mécanique des différents constituants de la voie (sous-couches, ballast, traverse et rail) sous l'effet des charges et des surcharges dynamiques réelles transmises par les véhicules au niveau du rail, en particulier aux vitesses de circulations élevées.
Pour cela, un procédé d'instrumentation, intitulé Smartvia® Track, a été conçu et développé au Centre de Recherche d'Eurovia. Celui-ci permet en particulier une collecte automatisée des données au passage des circulations ferroviaires et leur transmission en temps réel sur un serveur sécurisé accessible en ligne.
Ce procédé a été mis en œuvre sur deux sections du tronçon Angoulême-Bordeaux lors de la construction de la LGV SEA entre 2014 et 2016 . La première est constituée d'une couche sous-ballast granulaire classique en Grave Non-Traitée (GNT) tandis que la sous-couche de la seconde est en Grave-Bitume (GB). Un total de 158 capteurs a été installé aux différents niveaux de chaque structure (couche de forme, couche de réglage en GNT, GB, ballast, traverse, rail) afin de mesurer un certain nombre de grandeurs physiques (humidité, température, accélération, pression, déformation).
La mise en service du procédé Smartvia® Track a été effectuée fin août 2016 sur les deux sections instrumentées afin de recueillir les données de mesures liées au passage des premières marches d'essais (vitesse constante de 80 km/h) prévues sur la LGV SEA à partir de septembre 2016. A la suite de ces premières circulations, deux phases de montée en vitesse (vitesse constante comprise entre 160 et 352 km/h) ont été réalisées sur la fin d'année. Les données de mesures, récoltées durant ces premières phases de circulations et relatives aux différentes configurations de trains circulant à différentes vitesses, sont présentées à titre illustratif en fin de papier. Le traitement de l'ensemble de ces données et leur analyse se poursuivra au cours de l'année 2017 afin de répondre aux problématiques évoquées précédemment.